Engagement (théorie de)
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théories
Pour citer cet article
Jean-Léon BEAUVOIS, Robert-Vincent JOULE, « Engagement (théorie de) », in CASILLO I. avec BARBIER R., BLONDIAUX L., CHATEAURAYNAUD F., FOURNIAU J-M., LEFEBVRE R., NEVEU C. et SALLES D. (dir.), Dictionnaire critique et interdisciplinaire de la participation, Paris, GIS Démocratie et Participation, 2013, ISSN : 2268-5863. URL : http://www.dicopart.fr/fr/dico/engagement-theorie-de.
Dans son usage courant, le mot engagement signifie qu’une personne s’est délibérément impliquée dans une action ou un cours d’action, par exemple politique, pour lequel elle est motivée et duquel elle attend des résultats satisfaisants pour elle ou pour autrui. Ainsi dit-on qu’on s’est engagé dans une opération de collecte pour les Restaurants du cœur. L’engagement est le fait d’une décision volontaire de s’impliquer dans cette opération. Il a une origine interne à la personne. Quelques psychologues, notamment en psychologie du travail, ont adopté un concept proche de cette acception, notamment lorsqu’ils évoquent l’engagement organisationnel (voir le numéro spécial consacré à l’engagement dirigé par Christian Vandenberghe, en 2002, par la revue Psychologie du travail et des organisations).
- sur les traits de la situation dans laquelle un acte initial est réalisé qui feront de cet acte un acte préparatoire « engageant », insérant donc la personne dans un cours d’action, ce qui la conduira à aller au-delà de l’acte initial. Signalons plus particulièrement : un contexte (affirmé ou non) de liberté (rôle important des « déclarations de liberté » comme « évidemment tu fais comme veux, c’est à toi de voir… », voir Beauvois, 2011) ; la saillance de conséquences importantes que peut avoir l’acte réalisé ; le caractère public et non anonyme de l’acte réalisé ; la répétition de l’acte réalisé ; le caractère non révisable du comportement réalisé ; l’absence de récompenses ;
- sur les effets que l’on peut attendre de l’engagement par un acte préparatoire initial. Trois types d’effets sont à mentionner :
- la production d’évaluations et attitudes nouvelles justifiant la réalisation par la personne de cet acte (effet dit de rationalisation : il est important d’inciter les gens à conduire plus prudemment ; le jouet n’est pas si intéressant que ça ; la thèse que je viens de défendre n’est finalement pas si sotte…). Un tel effet de rationalisation a surtout été étudié dans le cas d’actes initiaux problématiques ;
- la réalisation de comportements ultérieurs plus difficiles ou coûteux qui n’auraient pas été réalisés sans l’engagement. Effet typique du pied dans la porte ;
- la production d’une image de soi par auto-attribution de traits expliquant l’acceptation de l’acte et la production d’actes nouveaux, surtout lorsque l’acte préparatoire n’est pas problématique (je suis finalement quelqu’un de bien, qui se bat pour les nobles causes, qui aime bien faire son travail, etc.).
- cette théorie a servi de cadre pour de nombreuses interventions en matière de prévention (usage du préservatif par des lycéens, port des appareils de sécurité par des ouvriers, dépistage du sida…) et d’actions en faveur de l’environnement (pour synthèse : Joule et Beauvois, 2009 [1998]) ;
- un nouveau concept a été récemment proposé. Il s’agit du concept de communication engageante (Joule, Girandola, et al., 2007). Ce concept désigne à la fois une nouvelle pratique d’intervention et un nouveau paradigme de recherche. Il renvoie à un rapprochement entre, d’une part, les travaux relevant de la théorie l’engagement et, d’autre part, les travaux relevant de la communication et, plus précisément, de la communication persuasive. L’approche ouverte par le concept de communication engageante se caractérise, dans son expression la plus simple, par la diffusion d’un message informatif et/ou persuasif après ou pendant la réalisation d’un ou de plusieurs actes préparatoires. Cette façon de procéder permet d’augmenter les effets cognitifs et comportementaux de l’engagement.
- , 1963, « Effects of Seventies of Threat on the Valuation of Forbidden Behavior », Journal of Abnormal and Social Psychology, no 66, p. 178-182.
- , 2011, Les Influences sournoises. Précis des manipulations ordinaires, Paris, François Bourin.
- , 1981, Soumission et idéologies. Psychosociologie de la rationalisation, Paris, Presses universitaires de France.
- , 1996, A Radical Dissonance Theory. European Monographs in Social Psychology, Londres, Taylor & Francis.
- , 1966, « Compliance without Pressure: The Foot-in-the-Door Technique », Journal of Personality and Social Psychology, vol. 4, no 2, p. 195-202.
- , 2009 [1998], La Soumission librement consentie, Paris, Presses universitaires de France.
- , 2012, Petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens, Grenoble, Presses universitaires de Grenoble.
- , 2007, « How Can People be Induced to Willingly Change Their Behavior? The Path from Persuasive Communication to Binding Communication », Social and Personality Psychology Compass, vol. 1, no 1, p. 493-505.
- , 1971, The Psychology of Commitment. Experiments Liking Behavior to Belief, New York, Academic Press.
- , 1966, « A Test of a Model of Commitment », Journal of Personality and Social Psychology, vol. 3, no 3, p. 349-353.
- , 1947, « Group Decision and Social Change », in NEWCOMB T.M., HARTLEY E.L. (dir.), Readings in Social Psychology, New York, Henry Holt, p. 330-344.
- , 2002, « L’engagement », Psychologie du travail et des organisations, vol. 8, no 3.